Tout ce qui commence bien se termine mieux. C’est avec cette philosophie que l’on doit "entamer" la relation avec les cochettes, qui sera l'un des points les plus délicats de la conduite dans l'élevage. Si on veut avoir de bons résultats, on doit partir « du bon pied » avec les cochettes.
Appeler les choses par leur nom !
Comment doit-on appeler les jeunes truies qui n'ont pas encore été saillies dans l'élevage ?
On a tendance à confondre deux termes qui en réalité sont différents mais que l'on utilise indifféremment : nullipare et cochette (primipare).
En réalité, la nullipare est une truie qui n'a pas encore mis bas et qui, par conséquent est soit saillie ou bien va l’être. Quand cette truie met bas (c'est-à-dire dans la salle de mise-bas), elle passe de l'état de nullipare à celui de cochette (primipare). Il est cependant aujourd'hui très fréquent d'oublier le terme nullipare et d'appeler cette truie cochette pendant toute la période. Par conséquent, on utilisera ce terme dans ce chapitre et on parlera de cochette.
Facteurs qui rendent la cochette plus délicate et en même temps plus importante
Il existe différents facteurs qui la rendent particulièrement délicate :
1. C'est un animal qu'il faut adapter normalement à la pathologie de l'élevage (son adaptation sanitaire sera d'une particulière importance). Tout plan d’incorporation des cochettes qui ne tiendra pas compte de leur adaptation sanitaire échouera.
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2. Elles représentent presque 25 % de l’effectif total d'un élevage avec un cheptel stabilisé. 3. Elles représentent le groupe le moins productif de l'élevage. |
Ces facteurs sont ceux qui nous obligeront à travailler si possible davantage et mieux dans l'élevage. Si on travaille bien avec les cochettes on commencera « du bon pied ».
L'adaptation sanitaire
Il existe une autre erreur en parlant d'adaptation, c'est de la confondre avec la période de quarantaine.
Maintenir en quarantaine suppose de loger les cochettes dans un lieu totalement séparé et éloigné de l'exploitation pendant un certain temps. Pendant ce temps, on vérifiera que les animaux soient sains avant de les introduire dans l'élevage définitif, ce qui réduira le risque d'introduction d’une maladie nouvelle dans l'élevage (la quarantaine peut durer entre 3 à 5 semaines).
L'adaptation permettra un contact progressif des nouveaux animaux avec les germes spécifiques du nouvel élevage, de façon à qu'ils aient le temps de développer de bonnes défenses (immunité) et donc d'éviter qu’ils soient malades à l'introduction dans l'élevage de façon définitive.
Les cochettes doivent pouvoir être isolées du reste des animaux pour leur permettre un contact contrôlé avec le microbisme de l'élevage. Cet isolement n’est pas nécessairement aussi strict que celui exigé pour la quarantaine : un simple local séparant physiquement ces animaux des autres (avec une porte fermée) ou un parc extérieur à l'extrémité de l'élevage peut servir.
Pour obtenir cette exposition, on peut utiliser :
• Les excréments : avec ceux-ci, on essaye "d'habituer" l'appareil digestif aux nouveaux agents. On utilisera des excréments de vieilles truies ou de vieux verrats qui doivent être du jour même. On les déposera sur le sol et on versera de l'aliment dessus (en petite quantité) pour faciliter l'ingestion des fèces. Ce type de contact est connu sous le nom "feed-back".
• Le contact nasal avec d'autres animaux avec lequel on obtiendra une accoutumance à la pathologie digestive, en plaçant des vieilles truies ou des verrats dans des cases adjacentes. Parfois ce contact se fait avec des porcelets. • Les vaccins : les vaccins ne sont ni plus ni moins qu'une méthode d'infection contrôlée des animaux. Dans ce cas, on réalisera les vaccinations selon la prophylaxie déjà établie de l'élevage (qui dépend des maladies présentes). |
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Cochettes en adaptation |
Deux pays, deux mondes, deux mois
Une fois la cochette adaptée sanitairement on peut déjà penser à sa saillie.
A ce moment là, nous serons envahis par un flot de doutes :
- Quand est-il mieux de les inséminer ? - Doit-on tenir compte de l'âge ou du poids ? - Quelle conduite doit-on tenir ? - Comment obtiendra-t-on plus de longévité ? |
Il n'est pas facile de répondre à ces questions et il est très probable qu'une réponse que l'on peut donner aujourd'hui pourra facilement être réfutée demain.
Aujourd'hui on a deux manières différentes de conduire les cochettes qui sont nées dans des pays différents ! Pour les comprendre, on les appellera la stratégie chilienne et la stratégie danoise. Les deux présentent des options totalement différentes, on pourrait même dire opposées. Curieusement, ce qui différencie les deux stratégies à la base est le moment de l'insémination : alors que la stratégie chilienne préconise de faire l'insémination autour des 6 mois de vie, la stratégie danoise la fait juste deux mois après, à 8 mois.
Stratégie chilienne |
La stratégie chilienne
Elle est basée sur l'idée de ne pas “laisser dormir” la truie en essayant qu'elle soit productive le plus tôt possible. Dans ce sens, on recherche les pubertés les plus précoces possibles. Pour obtenir ceci, la stimulation avec le verrat commence vers 110-120 jours d'âge de la cochette, quand elle atteint 70 à 80 kgs. A partir de ce moment, on laisse passer deux chaleurs (140 et 160 jours) pour faire la première saillie à 180 jours d'âge. Dans certains cas, pour aider à marquer les chaleurs, et pour « pré-stimuler », on fait deux saillies ou inséminations (à 140 et 160 jours) avec un mâle vasectomisé ou bien avec de la semence morte.
La stratégie danoise
Pour sa part, la stratégie danoise inséminera les cochettes beaucoup plus tard (à 8 mois). On recherchera tout d'abord une durée de quarantaine beaucoup plus longue, ensuite on les mettra dans le local d'adaptation dans lequel elles seront élevées et dans lequel elles n'auront aucun contact avec aucun mâle. Quand la cochette atteindra environ 140 kg, avant 8 mois d'âge, elle sera transférée dans un parc et stimulée avec des mâles de sa taille, au minimum 20 minutes le matin et 20 mn l'après-midi : on va « produire » ainsi des cochettes en chaleurs. Plus tard, 4 ou 5 jours avant la venue en chaleur, on les place dans des cases pour les inséminer au bon moment. Ce système s'accompagne normalement d'une technique qui utilise ces cochettes comme nourrices dans la salle de mise-bas.
Cochette en chaleur | Verrat stimulant des cochettes |
Comme on l'a ainsi vu, s’il y a bien différents critères concernant le moment de saillir la cochette, tout le monde est d’accord au sujet de la règle de l'insémination. Puisque la cochette a des chaleurs plus irrégulières, il est conseillé de faire les inséminations toutes les 12 heures tant qu'elle est en chaleur.
De ces deux systèmes, le système danois est celui qui gagne le plus de terrain car, bien qu'il ait l'inconvénient de prendre plus de temps avec les coûts qui vont avec, il offre une taille de portée supérieure et une longévité beaucoup plus longue de la truie.