Les diarrhées néonatales, c'est à dire celles qui apparaissent dans les 2 à 3 premiers jours après mise bas, restent une pathologie importante en élevage de porcs. Cette-ci a considérablement évolué avec une très nette régression des diarrhées "classiques" causées par Escherichia coli, le virus de la gastro-entérite transmissible (GET) ou Clostridium perfringens de type C.
Aujourd'hui, on assiste plutôt à un "syndrome diarrhée néonatale" où les échecs ou semi-échecs thérapeutiques sont importants. L'impact économique est surtout lié à la morbidité élevée qui entraînent des retards de croissance alors que la mortalité est généralement contenue. L'organisation du travail aussi s'en ressent car les problèmes sont observés essentiellement les vendredi-samedi-dimanche avec comme conséquence un surplus d'interventions sur les animaux pendant le week-end.
Le diagnostic est de plus en plus complexe avec le rôle des clostridiums en particulier. Les mesures thérapeutiques éprouvées restent encore rares et peu transposables d'un élevage à l'autre. Les pratiques d'élevage sont aussi des facteurs importants voir déterminants dans l'apparition de la diarrhée.
Les agents infectieux impliqués
On impute ce syndrome à de nombreux agents, tant bactériens que viraux, pouvant agir seuls ou en association. Au niveau des agents bactériens, la difficulté réside dans leur présence naturelle chez l'animal et donc à la difficulté de distinguer le "pathologique" du "normal"
Diarhée
néonatale : entérite colibacillaire
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Les colibacilles
Les colibacilles sont des hôtes normaux qui colonisent rapidement le tractus digestif du porcelet. Depuis quelques années, on constate une nette diminution de l'implication des souches traditionnelles telles que les souches possèdant les facteurs d'attachement (pili) K88, 987P, F41 ou K99. Ces souches sont responsables de la production de toxines thermostables (Sta, Stb) ou thermolabiles ( Lt). L'utilisation des vaccins anti-colibacillaires est une solution largement éprouvée avec succès
Avec les progrès et la vulgarisation de la biologie moléculaire, d'autres facteurs de virulence dont le rôle pathogène reste à préciser peuvent être mis en évidence.
Les clostridiums
2 genres de clostridiums sont connus pour leur implication dans les diarrhées néonatales : Clostridium perfringens et Clostridium difficile.
Clostridium perfringens
Clostridium perfringens est un agent étiologique de multiples syndromes chez les animaux domestiques. La production de différentes toxines produites par cette bactérie permet de distinguer 5 biotypes.
Toxine |
Alpha
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Beta
(ß)
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Beta
2 (ß2)
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Epsilon
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Iota
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Gène codant la production de toxine |
cpa
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cpb
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cpb2
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etx
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iA
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Biotypes
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A
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X
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(X)*
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B
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X
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X
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X
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C
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X
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X
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(X)*
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D
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X
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X
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E
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X
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X
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* toxine associée à ces biotypes. Dans ce cas, le biotype précise la présence de la toxine bêta 2 (Clostridium perfringens type A ß2 ou C ß2)
* Clostridiums perfringens de type A
C. perfringens de type A est régulièrement isolé du tube digestif des porcelets. La détection de présence de la toxine alpha se réalise directement à partir de fèces par une technique ELISA.
Depuis quelques années, une nouvelle toxine, nommée bêta 2-(ß2) produite par C. perfringens a été identifiée ainsi que le gène codant sa production. Plusieurs études l'incriminent dans l 'apparition des diarrhées néonatales chez le porc mais aussi chez d'autres espèces animales (bovin, cheval, chien ). Plus de 80 % des souches de C. perfringens isolées dans l'intestin des porcelets présentant de la diarrhée possèdent le gène codant la production de la toxine ß2. Toutefois, il n'est pas toujours aisé de préciser réellement le rôle réel de ce C. perfringens de type A ß2 dans l'apparition des diarrhées compte tenu que, d'une part, il n'existe pas de tests commerciaux permettant d'évaluer la présence ou non cette toxine et, d'autre part, C. perfringens est un hôte normal du tube digestif qui s'implante et se multiplie très rapidement après la naissance du porcelet. Il faut noter qu'aujourd'hui qu'il n'existe pas de vaccins commerciaux contenant la toxine béta 2.
Diarhée
néonatale : entérite à Clostridium perfringens
de type C
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* Clostridium perfringens de type C
Incriminé dans l'entérite nécrosante du porcelet, le diagnostic est facilité par l'observation des lésions provoquées au niveau de l'intestin grêle, par l'émission de fèces hémorragiques et une mortalité très importante. D'autre part, comme pour la toxine alpha, la présence de toxine bêta peut être décelée par une technique Elisa. Le génotypage des souches de C. perfringens de type C montre que le gène cpb2 est très souvent associé au
gène cpa et cpb.
Oedème
du mésocôlon
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Clostridium difficile
L'observation fréquente à l'autopsie chez des porcelets atteints de diarrhée néonatale de lésions de typhlocolite associées fréquemment à un dème important du mésocolon et la présence de toxine de C.difficile dans les fèces suggèrent que C. difficile pourrait être un agent pathogène important dans les diarrhées néonatales.
Cependant cette hypothèse est à relativiser compte tenu que l'on peut aussi trouver de la toxine sur des animaux sains au même stade. Dans ce cas, la quantité de toxine détectée pourrait être une des données essentielles pour le diagnostic permettant d'incriminer ou non C.difficile comme agent responsable de la diarrhée. Le rôle de cette bactérie sera doute clarifié dans le futur lorsque l'on pourra disposer de vaccins commerciaux ou d'autovaccins contre C.difficile.
Les virus
Gastro-entérite transmissible (GET)
Causée par un coronavirus, cette pathologie a quasiment disparue depuis près de 20 ans.
Rotavirus
En ce qui concerne les rotavirus, présents dans la plupart des élevages, ils sont peu impliqués dans le syndrome "diarrhée néonatale" sauf dans certains cas comme l'introduction massive de cochettes ou dans les cas de repeuplements à partir d'animaux de haut statut sanitaire.
SDRP
En l'absence d'immunité maternelle, c'est un agent infectieux important des diarrhées néonatales dans les régions où le virus sévit. La diarrhée persiste plusieurs jours avec une morbidité et une mortalité importantes. Dans la plupart des cas, on observe d'autres troubles en maternité que ce soit sur les porcelets ( "épidémie" d'arthrite . ) ou sur la truie ( mise bas avancée, agalactie .).
La suite de l'article, consacré aux techniques de diagnostic des diarrhées néonatales, sera publié prochainement.
Jean LE GUENNEC - Directeur du Laboratoire Labofarm - Loudéac (France)