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Après la session d’hier de Mercolleida, nous voyons que le prix espagnol du porc en est à 12 semaines consécutives de baisse (hormis une répétition technique pour un jour férié). De 1,848 à 1,587 euros le kilo vif ; une chute totale de 26,10 centimes. En résumé, nous avons reculé de 14 %. Des baisses sans éclats, mais constantes. Malgré tout, notre prix reste en tête des prix européens, bien que de manière moins marquée qu’il y a trois mois.
La viande, tant bien que mal, a résisté sans descendre au-delà de quelques ajustements symboliques ; cela a permis d’augmenter la marge des abattoirs, qui travaillent tous désormais confortablement en positif.
Le prix actuel (1,587 euros / kg vif) reste assez au-dessus du coût de production, et l’éleveur profite d’une année très rentable jusqu’à présent. Les poids moyens des carcasses atteignent des sommets historiques semaine après semaine, et tant les éleveurs que les abattoirs s’accordent à dire que la situation est satisfaisante (l’éleveur maximise son bénéfice par tête, tandis que l’abattoir obtient plus de kilos avec les mêmes porcs).
Actuellement, un plus grand nombre de porcs sont abattus chaque semaine par rapport à il y a un ou deux mois ; cette offre généreuse est bien absorbée et l’immense machine de production, d’abattage et de découpe en Espagne fonctionne avec la précision d’une horloge suisse. Les niveaux d’abattage atteignent un record cette année (près du record historique de 2021). Pour le moment, notre viande exportée trouve preneur, bien plus au sein des frontières de l’UE que dans les pays tiers.
L’Allemagne a enregistré ce mercredi une baisse surprenante de 8 centimes / kg carcasse, soit une chute de 4 %. Le nouveau prix de référence s’établit à 1,92 euros / kg carcasse, le plus bas depuis novembre 2022. Ce prix s’éloigne de notre niveau et pourrait nous forcer à revoir notre plancher.
Mentionnons ici ce qui a été la nouvelle européenne du mois : le géant danois Danish Crown a annoncé une restructuration de son personnel, avec le licenciement d’environ 500 employés administratifs. Selon le communiqué publié par Danish Crown, leurs dépenses étaient excessives par rapport aux bénéfices.
Au cours des derniers mois, la Corée et le Japon se sont montrés très actifs, achetant des poitrines à de très bons prix. Il est à noter que le Brésil a augmenté ses exportations (à bas prix) vers ces marchés, et la tension commerciale autour de cette pièce se modère. Rien ne dure éternellement.
La Chine reste apathique ; nous ne savons pas comment la situation évoluera après que l’UE a définitivement approuvé d’importants droits de douane punitifs sur les véhicules électriques chinois. Pour l’instant, certains grands abattoirs espagnols ont perdu leur agrément pour vendre sur ce marché. Nous devons attendre pour voir si la situation va empirer.
La Russie a interdit les exportations d’Espagne vers son territoire en avril 2013. À cette époque (en guise de représailles au soutien européen à Obama, alors président américain), la Russie était, et de loin, le principal client du porc espagnol. Examinons l’évolution des données de production de ce vaste pays:
Il est clair que la production russe indigène a explosé. Les données montrent une croissance brutale de 165 % en vingt ans ! La Russie a accompli un travail colossal et titanesque de formation technique de ses éleveurs. Actuellement, le prix du porc vif en Russie est légèrement supérieur à un euro par kilo. Aussi bon marché qu’ils puissent se procurer l’alimentation, il semble qu’à l’heure actuelle la production ne soit pas très rentable. Récemment, la Russie a commencé à exporter vers la Chine. Dans quelques années, si cette progression se poursuit, la Russie pourrait détrôner l’Espagne de sa quatrième position mondiale parmi les pays producteurs (sous réserve de la compétition du Vietnam, qui nous talonne avec plus de 53 millions de têtes abattues en 2023).
Sur l’échiquier mondial, la Russie semble prête à jouer un rôle majeur. Sa position de puissance céréalière le garantit (rappelons l’adage, communément accepté, selon lequel “le porc n’est rien d’autre que du grain transformé”).
Revenons à notre situation. La principale inconnue est de savoir jusqu’où les prix vont baisser en Espagne. Nous penchons pour l’hypothèse que le plancher ne doit pas être très loin et que, quoi qu’il arrive, la baisse s’arrêtera bien avant d’atteindre le prix de revient.
Aucun grand changement ne semble se profiler à court ou moyen terme. Le prix du porc devrait cesser de baisser à un moment donné en novembre et rester presque immobile jusqu’en février. La situation actuelle en Espagne se résume ainsi : abattages importants, ventes fluides, Noël en perspective, avec à la fois abattoirs et éleveurs en marge positive. Qui dit mieux ?
Les transformateurs ont vu, impuissants, que la viande ne baissait pas malgré la dégradation du prix du vif. Ils ont dû se contenter des miettes. Mieux vaut un peu de bonheur que rien du tout. De nouvelles baisses de la viande restent possibles. La partie continue.
Pour conclure, une phrase frappante de Steve Jobs : “Parfois, la vie te frappe à la tête avec une brique, mais ne perds pas la foi.”
Guillem Burset
