Dans le chapitre précédent, nous soulignions l'importance particulière revêtue par le cycle sexuel de la truie dans l'élevage porcin. Il est évident que les chaleurs de la truie doivent être coordonnées avec le moment de l'insémination afin d'obtenir un niveau d'efficacité optimal en termes de fécondation. En production porcine, l'insémination est réalisée en quasi-totalité de façon artificielle, c'est à dire que le sperme est prélevé sur un verrat, puis évalué et dilué, afin d'être utilisé chez un nombre élevé de femelles. La valeur d'un verrat, en tant que reproducteur, dépend de sa fertilité et de son comportement sexuel, outre bien sûr, sa capacité d'amélioration génétique.
Figure 1. Le comportement sexuel du mâle dépend tant de sa libido (ou motivation sexuelle) que de sa capacité physique à monter la femelle. |
Le comportement sexuel du verrat comprend la motivation sexuelle (ou libido) et la capacité de saillie. En présence d'une femelle en chaleur, le comportement sexuel du mâle se caractérise au départ par l'exploration et le flair de la zone ano-génitale de la femelle. Le mâle lui frappe les flancs avec le museau ou groin, urine fréquemment, émet un son caractéristique et salive abondamment. Au cours de ce processus, il tentera de monter la femelle à plusieurs reprises. Toutefois, il n'y parviendra que lorsque cette dernière y sera disposée, en adoptant le réflexe d'immobilité.
La libido du verrat est un comportement qui dépend directement des androgènes, les hormones sexuelles masculines qui sont synthétisées dans les testicules. Cependant, on a observé que les taux d'androgènes nécessaires pour maintenir une libido correcte sont très inférieurs à ceux rencontrés normalement chez les mâles. Autrement dit, normalement, les problèmes de libido ne sont pas liés aux taux de ces hormones.
Facteurs influant sur la libido du verrat
Logement du verrat : les mâles doivent être logés à proximité des femelles, car les stimuli qu'elles émettent les aident à maintenir leur motivation sexuelle. Il faut toutefois rappeler que, pour les femelles, la proximité permanente du mâle peut compliquer la détection des chaleurs. En général, les enclos de mâles et femelles devraient être situés à une distance comprise entre 1 à 15 mètres.
Système d'élevage : les mâles doivent être élevés en groupe. En effet, l'isolement chez le jeune porc peut contribuer à une réduction de la libido de manière irréversible. Le logement individuel des mâles ne devrait pas intervenir avant l'âge de 3-4 mois, et ce tout en maintenant un contact visuel et olfactif, et non physique, avec d'autres mâles. Si les mâles ne font pas preuve d'une agressivité excessive ou de comportement sexuel, ils peuvent rester ensemble, mais la probabilité de voir des problèmes apparaître est plus importante qu'en les logeant de manière individuelle.
Premières montes : les premières expériences sont capitales pour le comportement sexuel du mâle. Ainsi la peur ou la douleur ressentie lors de ces moments peuvent déterminer le comportement de l'animal pour le reste de sa vie. Il est important de toujours tenir compte de certains éléments, notamment lors des premières montes du mâle (tableau 1). .
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Tableau 1. Eléments à prendre en compte lors des premières montes d'un verrat. |
Fréquences des montes : une fréquence d'utilisation faible ou élevée peuvent réduire la libido du verrat, bien que ceci ne survienne normalement que de façon temporaire. Les travaux réalisés ne permettant pas de définir clairement la fréquence d'utilisation d'un verrat, on considère généralement que les mâles jusqu'à 10 mois devraient effectuer une monte tous les 7 jours. Les mâles de plus de 10 mois peuvent effectuer deux montes tous les 5 jours sans présenter de problèmes.
Température ambiante : l'effet sur la libido a beau n'être que transitoire, les verrats font preuve d'une motivation sexuelle moindre lorsque la température ambiante dépasse les 25-30°C. Tout ceci dépend de divers facteurs comme le poids, l'état corporel et la fréquence d'utilisation de l'animal.
Figure 2. Facteurs qui affectent la libido du verrat |
Commentaires de l'ISPAIA
Effectivement le logement des truies à proximité peut compliquer la détection des chaleurs. Il est évident qu'en période d'œstrus, les truies ne sont pas en permanence immobiles. Or à la suite d'une immobilité parfaite, une truie va présenter une période réfractaire, c'est à dire une période au cours de laquelle on risque de la juger " douteuse ". Et cette période peut aller jusqu'à une demi-heure…Pas de chance donc si vous débutez votre détection alors que la truie vient d'être parfaitement immobile face à son voisin de verrat, mais en votre absence !
C'est un adage mais en reproduction même artificielle, il faut deux partenaires ! Le problème est qu'en situation d'élevage et de contexte économique difficile, on accorde parfois une attention insuffisante aux verrats. Or, de leur aptitude à détecter correctement dépend la qualité de votre travail. Il est ainsi impératif de préparer le renouvellement d'un verrat qui vieillit en prévoyant l'arrivée d'un plus jeune. Avant de le réformer toutefois, il faut lui offrir des conditions de travail adéquates. En système truies bloquées par exemple, il ne faut pas que le verrat puisse circuler devant toute la bande. Limitez ses mouvements par des barrières devant une demi-douzaine de truies. Vous favoriserez son attention pour toutes les truies (ainsi que celle des truies).
Revenons aussi sur un point évident pour les Espagnols mais qui n'est pas souvent discuté, au moins dans l'Ouest de la France : l'impact de la chaleur sur la libido. Même s'il y a des variations entre verrats, c'est un phénomène connu depuis plus de 20 ans (Winfield 1981 cité dans "Diseases of Swine"). Application pratique : à quelle heure se fait donc la détection l'été ? En fonction du programme de travail ou tôt le matin et en soirée pour justement optimiser la forme de nos verrats ?