L'immunisation intra-utérine, une voie de vaccination adaptée à la production porcine

Vaccins pour l'élevage

Les vaccins sont utilisés pour prévenir la propagation de maladies causées par des micro-organismes. Les vaccins efficaces préviennent la maladie chez les individus et empêchent également la transmission des bactéries et des virus au sein de la population. Si la transmission des bactéries est réduite en raison d'une diminution de l'excrétion, il est moins nécessaire d'utiliser des antibiotiques et les bactéries risquent moins de devenir résistantes aux antibiotiques. Les vaccins sont une alternative importante aux antibiotiques, et sont essentiels pour maintenir les porcs en bonne santé et la rentabilité de l'élevage.

Voies d'immunisation

Les vaccins sont généralement injectés dans le muscle, mais chez les animaux d'élevage, l'administration intramusculaire demande beaucoup de travail au personnel, est stressante pour les animaux et présente un risque pour la sécurité en raison de la rupture des aiguilles et des piqûres accidentelles. Il est nécessaire de mettre en place des stratégies de vaccination alternatives pouvant être adaptées aux programmes de vaccination de masse, telles que des vaccins oraux dans l'eau ou l'alimentation. Cependant, il est difficile de suivre la quantité de vaccin que reçoit chaque animal dans un enclos lorsqu'il est administré dans l'aliment ou l'eau.

Stratégie de vaccination alternative (vaccin intra-utérin)

Pour qu'une stratégie de vaccination soit efficace chez les porcs, les vaccins doivent protéger contre les maladies, mais ils doivent aussi être faciles à administrer et à intégrer dans les pratiques de conduite actuelles. Notre équipe, dirigée par le Dr Heather Wilson, étudie actuellement les moyens d'intégrer les vaccins dans la gestion de la reproduction des truies et des cochettes. L'insémination artificielle (IA) est une pratique courante dans plus de 90 % des élevages, ce qui rend l'utérus facilement accessible pour la vaccination. Lorsque les truies entrent en chaleurs, elles présentent une réaction de lordose (réflexe d'immobilité), c'est-à-dire qu'elles restent rigides pendant une courte période, ce qui permet d'administrer les vaccins en toute sécurité. Nous vérifions si les vaccins administrés directement dans la poche de semence peuvent entraîner une réponse immunitaire efficace sans affecter la fonction du sperme et la fertilité.

Développement d'un vaccin intra-utérin

Notre équipe a mené plusieurs expériences avec des truies reproductrices. Dans l'une des premières expériences, on a pris des truies qui avaient déjà reçu un vaccin commercial intramusculaire contre le parvovirus porcin (PVP) au cours de la gestation précédente. Un vaccin PVP a ensuite été administré dans la dose de semence immédiatement avant l'insémination habituelle. Les truies ayant reçu le vaccin intra-utérin ont présenté une augmentation des anticorps sanguins, ce qui indique que l'utérus pourrait être une voie potentielle de vaccination (Hamonic et. al 2020).

Dans les expériences suivantes, les pochettes ont reçu un vaccin contre le virus de la diarrhée épidémique porcine (DEPv) dans la semence comme primovaccination (ils n'avaient jamais été vaccinés ou exposés au DEPv). La vaccination intra-utérine a été effectuée au cours de 3 cycles de chaleurs différents. Les truies de remplacement vaccinées par voie intra-utérine présentaient des anticorps contre le DEPv significativement élevés dans leur sérum, leur tissu utérin et leur colostrum. En outre, le nombre de porcelets nés, leur poids à la naissance et leur croissance sur plusieurs semaines étaient comparables à ceux des porcelets nés de truies témoins. Ces premiers résultats suggèrent que l'immunisation intra-utérine pourrait ne pas affecter la fertilité, la santé des porcelets ou le taux de croissance, autant de facteurs critiques pour le développement de cette nouvelle voie d'immunisation. Lors d'une infection expérimentale par le DEPv, nous avons observé que les porcelets nés de truies vaccinées par voie intra-utérine présentaient une certaine protection passive contre l'infection par le DEPv par leur mère, mais que les titres d'anticorps neutralisants dans le colostrum n'étaient pas suffisamment élevés pour assurer une protection totale contre la maladie. Nous avons également étudié l'administration du vaccin sans semence aux truies lors de leurs premières chaleurs. Bien que cette approche ait montré que la voie était encore efficace, nous ne pensons pas qu'elle soit facilement applicable, car elle nécessite davantage de travail (Choudhary et. al 2021). L'administration de vaccins avec du sperme sera une option beaucoup plus intéressante pour les producteurs.

Pour améliorer encore l'efficacité du vaccin et maximiser la protection passive, nous améliorons la formulation du vaccin en utilisant des nanoparticules qui encapsulent ensemble l'antigène et les adjuvants. Cette approche nous permet de placer des adjuvants plus puissants dans la nanoparticule avec l'antigène pour renforcer la réponse immunitaire sans avoir d'impact négatif sur le sperme. Nous utilisons des nanoparticules de PLGA (acide poly lactique-co-glycolique) car elles sont l'une des nanoparticules biodégradables les plus efficaces et sont approuvées par la FDA américaine pour être utilisées dans les systèmes d'administration de médicaments.

Proposition de mécanisme de reconnaissance des vaccins dans l'utérus

La manière dont l'utérus agit en tant que site d'induction immunitaire n'est pas claire, car il n'y a pas d'organes immunitaires spécialisés visibles, tels que les plaques de Peyer qui sont présentes dans l'intestin. Cependant, il y a une augmentation naturelle des cellules immunitaires du sang vers l'utérus au moment des chaleurs et après l'IA avec la semence. Ces cellules immunitaires sont chargées d'éliminer les détritus et/ou les spermatozoïdes morts. La vaccination intra-utérine peut tirer parti de cette réponse immunitaire naturelle au sperme. Nous cherchons à savoir si les cellules immunitaires restent dans l'utérus pour générer une réponse immunitaire ou si ces cellules immunitaires ou le vaccin migrent vers les ganglions lymphatiques qui drainent cette zone.

Déterminer comment l'utérus agit en tant que site de vaccination pourrait nous permettre d'améliorer nos vaccins.

Notre équipe montre que la vaccination intra-utérine est innovante, qu'elle semble sûre et respectueuse des animaux et qu'elle peut être facilement intégrée aux pratiques d'élevage actuelles. Nos futures expériences visent à déterminer si l'immunisation intra-utérine peut protéger les truies et les truies de remplacement contre des maladies reproductives critiques telles que le virus du SDRP et également protéger les porcelets contre d'importantes maladies néonatales dues au rotavirus, à Escherichia coli, à Streptococcus suis, etc. par le biais d'une immunité passive via le colostrum.