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Marchés mondiaux du porc : impact de la guerre commerciale menée par Trump

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Les tarifs douaniers entraînent des conséquences majeures et impactent les filières porcines mondiales.

30 Avril 2025
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Depuis son arrivée au pouvoir, Donald Trump s’est engagé dans une guerre commerciale avec les partenaires économiques des USA. Pour les filières porcines, les conséquences économiques varient d’une région à l’autre.

Etats-Unis / Chine

La guerre commerciale entre les deux géants mondiaux a repris avec le retour de D. Trump au pouvoir. Les Etats-Unis ont décidé d’appliquer des droits de douanes envers les produits chinois et diverses annonces se sont succédées. La Chine a déjà répliqué avec l’instauration de droits de douanes supplémentaires par rapport aux tarifs en vigueur. Le porc américain sera ainsi sanctionné sur le territoire chinois et des droits de douanes totaux seront appliqués selon les produits du porc...

En 2024, les Etats-Unis étaient le deuxième fournisseur de la Chine, juste derrière l’Espagne, avec environ 438 kt exportées pour une valeur de 921 M€. La part des produits américains sur le marché chinois atteignait presque 20% en volume. Parmi les produits exportés sur la Chine, près des deux tiers sont des abats et le tiers restant est constitué de pièces de découpe congelées. L’augmentation des droits de douanes à l’entrée du marché chinois entrainera une diminution du volume de produits américains importés et une baisse de leurs prix.

Une conséquence directe est la perte de parts de marché pour les Américains qui impliquerait de trouver de nouveaux relais de croissance. En 2024, la Chine a absorbé 55% des abats exportés par les Etats-Unis devançant largement le Mexique (27%) et les Philippines (7%). Compte tenu de l’importance de la Chine et du nombre limité d’alternatives existantes, il est probable que les Etats-Unis perdent seulement 30% de leurs volumes d’abats actuellement exportés vers la Chine. Ces volumes seraient à redistribuer sur d’autres destinations, Mexique et Philippines en priorité. La perte des volumes d’abats exportés par les Américains représenterait environ 90 kt d’abats.

La Chine ne représente que 6% des pièces de découpe congelées exportées par les Etats-Unis. Les alternatives de débouchés sont bien plus nombreuses (Mexique, Japon, Corée du sud, Amérique Latine, Canada...). Il est probable que les mesures de rétorsions chinoises envers les produits américains génèrent une chute des volumes exportés par les Américains en viandes de l’ordre de 75%, soit plus de 330 kt, car exporter des viandes vers la Chine sera trop coûteux pour les abatteurs américains entrainant une réduction de leurs marges. Pour rester compétitifs par rapport aux prix des produits européens et brésiliens, la valeur unitaire des produits américains vendus sur ce marché devra décroitre. Cette perte de valeur est estimée à plus de 250 M€.

Les volumes perdus par les Etats-Unis sur le marché chinois du fait de la hausse des tarifs douaniers, pourraient être convoités par les Européens et les Brésiliens. Par ailleurs, les relations diplomatiques se tendent entre d’autres pays : la Chine a récemment confirmé sa volonté d’imposer le porc canadien de 25% supplémentaires, retirant la possibilité pour le Canada de se présenter comme une alternative au porc américain sur ce marché. La chute momentanée de l’offre en Chine entrainera des hausses de prix du porc. Les impacts de cette guerre sur les autres secteurs économiques ne permettent pas d’envisager une reprise de la consommation en Chine et de la croissance. Les importations chinoises en produits du porc se maintiendront certainement au même niveau qu’en 2024. En revanche, la Chine a annoncé vouloir privilégier ses partenariats commerciaux avec les pays des BRICS (c’est-à-dire Brésil et Russie particulièrement). Les Européens seront donc concurrencés par le Brésil et dans une moindre mesure la Russie.

Etats-Unis / Asie de l’Est

Les autres marchés asiatiques ne sont pas non plus exemptés. Ils subiront des hausses de tarifs douaniers variables d’un pays à l’autre. Ces marchés (Japon, Corée du Sud, Singapour, Philippines, Taïwan, Thaïlande…) n’ont pas riposté envers les produits américains compte tenu des conséquences économiques attendues pour d’autres secteurs économiques. En pratique, le porc américain ne sera pas discriminé sur le prix sur ces marchés. Mais, même si les autres marchés d’Asie de l’Est n'ont pas augmenté leurs tarifs douaniers, ils pourraient être moins disposés à acheter du porc américain et les États-Unis pourraient exporter un peu moins de porc vers ces marchés, favorisant d’autres fournisseurs tels que l’UE-27, le Brésil, le Canada et dans une moindre mesure la Russie.

Etats-Unis / Union européenne

L’UE-27 n’a pas été épargnée par la guerre commerciale menée par Donald Trump. Les produits européens seraient taxés de 20% supplémentaires. Environ 100 kt de viandes et coproduits du porc seraient impactés, principalement des pièces de découpe et des produits transformés. Une hypothèse est que l’UE maintiendrait ses volumes exportés vers les Etats-Unis pour plusieurs raisons. Les agréments pour exporter vers les Etats-Unis sont difficiles à obtenir et relativement coûteux. Une part significative des produits exportés par l’UE-27 sont des produits à forte valeur ajoutée. Il s’agit de charcuteries italiennes et polonaises qui, compte tenu de la présence de la FPA, ont peu de débouchés alternatifs. Ces produits sont peu substituables et spécifiques à la demande du marché nord-américain. Il est donc probable que les exportateurs refusent de perdre leur place sur ce marché. Le prix unitaire des produits pourrait en revanche être réduit, tout comme la marge des industriels européens, afin que les produits européens conservent leur compétitivité sur le marché américain. La hausse des droits de douanes sur les viandes et produits transformés devrait entrainer des pertes de marge de près de plus de 115 M€ pour les exportateurs européens, dont les deux tiers attribués aux produits transformés à forte valeur ajoutée, ce qui impactera surtout les exportateurs italiens (20 kt de produits transformés en 2024), polonais (8 kt) et danois (7 kt). Au-delà de la perte de marge, il est possible que certains volumes restent sur le marché européen et renforcent la pression à l'import.

Quelles opportunités pour les Européens et les Brésiliens ?

Sur le marché chinois, les produits du porc européens et brésiliens (pièces de découpe et abats) étaient déjà les plus compétitifs par rapport aux origines nord-américaines ces trois dernières années. Ces deux grands producteurs et exportateurs sont ainsi ciblés pour compenser l’amoindrissement des volumes exportés par les Etats-Unis sur ce marché (environ 450 kt de viandes et abats).

Les annonces nombreuses et contradictoires émanant du président des Etats-Unis invitent à une grande prudence quant à la mesure de leurs impacts. C’est pourquoi l’Ifip envisage plusieurs scénarios de répartition des tonnages libérés par les Etats-Unis, entre le Brésil et l’UE-27 :

  • Répartition actuelle : 15% pour le Brésil et 50% pour l’UE-27, 35% autres ;
  • Egalité entre exportateurs : 50% - 50% entre Brésil et UE-27 ;
  • Essor brésilien : 50% pour le Brésil et 30% pour l’UE, 20% autres.

Les volumes engagés varieraient donc de 125 kt à 225 kt pour l’UE et de 65 à 225 kt pour le Brésil. A ces volumes se rajouteront possiblement des opportunités sur les autres marchés d’Asie de l’Est, qui n’ont pas riposté face aux Etats-Unis mais qui pourraient être moins enclins à continuer d’acheter du porc américain. Ceci dépendra des relations commerciales entre les entreprises fournisseurs et les acheteurs asiatiques, et surtout des disponibilités en porc sur les bassins producteurs. Les perspectives de croissance sont légèrement haussières pour le Brésil en 2025 (+1,2 % de production par rapport à 2024, soit + 54 ktéc) et stables pour l’UE-27. La faiblesse des disponibilités supplémentaires entrainera une redistribution des flux du commerce (réduction du commerce intra-européen pour redistribution à l’extérieur de l’UE) et une hausse des prix du porc à la production sur ces deux marchés.

Sur le marché européen, dans un contexte de stabilisation de l’offre, une hausse de 125 kt de la demande en porc a pour conséquence d’augmenter les cours à la production de l’ordre de 1,1% en moyenne annuelle. Une hausse de 225 kt de la demande à l’export entrainerait une élévation des cours du porc d’environ 2,7% sur le marché français en moyenne annuelle. Ces perspectives paraissent intéressantes pour les éleveurs de porc et les exportateurs surtout dans un contexte de détente des prix des matières premières. Le secteur de la charcuterie-salaison sera peut-être plus durement touché compte tenu d’une réduction des disponibilités sur le marché et de la hausse attendue des prix des viandes. Du côté du Brésil, une élévation des prix du soja est prévue et les agriculteurs brésiliens pourraient à moyen terme privilégier la valorisation du soja au détriment de la viande de porc. Une réduction de l’offre en porc pourrait survenir si le conflit s’inscrit dans la durée.

Au-delà des répercussions économiques directes pour la filière porcine, la guerre commerciale menée par le Président Trump devrait engendrer d’autres conséquences majeures. La hausse attendue des prix pour les consommateurs, tant aux États-Unis qu’en Chine, ainsi que les incertitudes du maintien de la demande, risquent de freiner la croissance économique mondiale. Cette guerre amorce le début d’une crise globale. Ce contexte sera délétère pour le commerce international, les producteurs, les entreprises, et les consommateurs. Si des opportunités de croissance pourront avoir lieu à court terme, la majorité des pays et acteurs économiques s’en retrouvera perdante. La versatilité des annonces du Président Trump rend ces analyses fragiles, les impacts économiques seront variables en termes d'amplitude et de durée, au gré des annonces.

Elisa Husson, économiste Place des Marchés by Ifip

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Commentaires de l'article

Cet espace n'est pas destiné a être une zone de consultation des auteurs mais c'est un lieu de discussionouverts à tous les utilisateurs de 3trois3.
06-Mai-2025 TD2l'europe paie 3 à 4 fois plus cher le porc chilien, c'est bien plus grave que Trump, il a le dos large! elle est ou notre logique politico-écologique! La France me fait hônte.
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